Enfin,
ils sont rentrés chez eux ! La famille Simon est heureuse. Après trois
mois d'une vie étriquée dans un bungalow, ces Hautmontois sinistrés par
la tornade ont retrouvé depuis mardi la chaleur de leur foyer.
La façade du 24 de la rue Pierre-Curie à
Hautmont s'est gentiment ornée à l'approche des fêtes de fin d'année.
Une couronne est sobrement accrochée à la porte vitrée. Signes
extérieurs de catastrophe naturelle : deux carreaux brisés et la
marquise en verre qui est ébréchée. Dans le salon, un sapin trône au
milieu de la famille Simon. C'est bientôt Noël.
Jenny Simon n'aurait sans doute pas eu le coeur à le fêter, si
elle avait dû passer son 25 décembre dans le bungalow numéro 11. La
mère de famille pense aux autres sinistrés, qui n'auront pas le choix,
de toute façon : « Je les plains », gémit-elle, d'une voix douce un peu effrayée.
Le bungalow, elle ne s'y est jamais sentie à l'aise : aucune
décoration, zéro tentative d'appropriation. Le numéro 11 est resté un
numéro, froid et impersonnel.
Grenouilles
Aujourd'hui, Teddy est content. Quand on
demande à ce si vif et sémillant petit garçon de 7 ans ce qui lui a le
plus manqué pendant les trois mois de mobile home, il montre deux
choses : sa console de jeu et ses grenouilles en peluche, qu'il n'a pas
pu toutes emporter (1). « C'était chiant, je faisais rien. Je regardais la télé », explique-t-il d'un air triste. Teddy a souffert de la promiscuité : « Avec ma soeur, on était comme ça, tout collés ! » dit-il en joignant le geste à la parole.
Contrairement à sa soeur Élodie, Teddy dormait « comme une grosse paillasse avec ma petite grenouille »
au moment où la tornade a tout ravagé. Dans le mobile home, il a eu
peur le premier jour en voyant les bombonnes de gaz, avant qu'elles ne
soient rentrées dans un cache bouteille. « Ça l'a marqué », confirme son père. Élodie, 10 ans, n'a pas oublié ce que le retour au bercail n'a pas manqué de lui rappeler : « Quand
il pleut, j'entends tous les bruits dans ma chambre. Mais je me dis que
je suis en sécurité. La tornade ne peut pas revenir au même endroit. »
Si elle essaie de ne plus y penser, la petite fille aux yeux clairs
dort avec une veilleuse à côté de son lit, reliée directement à la
chambre de papa et maman. Depuis qu'elle a retrouvé sa maison bien
chauffée, Jenny Simon est tombée malade. La Hautmontoise a attrapé
froid. Un comble alors que la médiocre isolation des bungalows laissait
penser, à l'évidence, qu'ils étaient conçus pour l'été.
Au 24 de la rue Pierre-Curie, la vie reprend son cours.
Licencié un mois avant la tornade, Franck Simon va se remettre en quête
d'un emploi. Teddy a retrouvé ses grenouilles, Jenny va soigner son
rhume. Et puis, Élodie, ne t'inquiètes pas. La tornade ne peut pas
revenir deux fois au même endroit...
1. - Les meubles et effets personnels de la famille ont été conservés au domicile du père de Franck Simon.